Rescapés

Citation :

Ce texte "Rescapés" a pour objet de créer un RP où chacun peut se placer, décrire son personnage et prendre sa place dans une intrigue générale.

Il sert aussi à exprimer son avis sur l'avenir de la légion.

Si vous désirez juste discuter de façon classique, un sujet HRP-Rescapés est la pour ça. Mais en tout cas, ne restez pas sans rien dire...

Le sang a tâché son doigt. Elle le trempe dans l’eau du bain, frotte, frotte encore, presque à s’en user la peau.

- Le sang, les larmes de Dame Westen. Heureusement que cela part.

Ise tremble encore de la peur que lui a inspirée la possession de la spirit. L’équilibre a-t-elle dit ? Un grand pendule qui régit toutes choses ? Un petit pendule pour elle ? La magicienne doute. Elle a vu les esprits qui habitent le corps de Westen. Suffros... Lumi...

La serviette sur laquelle elle s’essuie se teinte encore de rouge, malgré le lavage furieux de son doigt. Peut-être le chevalier Radaamanthys a-t-il raison et Suffros aurait plus de puissance et d’influence que ne veut bien le laisser croire Westen ? Une vie qui leur serait propre ? Et pourquoi Westen pleure-t-elle des larmes de sang ?

Ise sort de la petite salle de bain, s’approche de la robe blanche qui sèche au soleil près de la fenêtre, l’examine, guette la moindre tâche. Rien, les serviteurs ont bien travaillé. Elle ajuste le plastron et serre les lacets. La large jupe de plumes colle un peu sur ses jambes encore humides mais elle n’y prête pas attention. L’épais matelas de son lit s’enfonce sous son faible poids alors qu’elle enfile ses bottes. Il faudra, un jour, changer cette armure trop mince, trop usée, surtout si elle retourne combattre dans les abysses.

- Je dois laisser de coté mes angoisses, ma peur, se murmure-t-elle pour s’encourager.

Mais sur qui peut-elle encore compter ? Leurs rangs se sont éclaircis ces derniers temps. Il reste bien sur Ruben et Akha, les solides piliers de leurs expéditions, les frères chevaliers Radaamanthys et Shunhades, fidèles et surs combattants, bien entendu Selene, et Westen maintenant. Le petit groupe bénéficie aussi du soutien des Anciens, heureusement, Anciens qui les ont invités à les rejoindre. Doivent-ils franchir ce pas ?

Trop de questions se pressent dans son esprit : s’unir aux anciens, vaincre les asmodiens, préserver cet équilibre cher à Westen. Et d’ailleurs, si les poilus tombent enfin, que deviendrait l’équilibre ?

Ise attrape le cor d’Heiron, espérant que tous entendent sa voix, et souffle dedans aussi fort qu’elle peut. Répondront-ils ?

Le Vent qui souffle à en perdre haleine… Au-dessus d’un champ de morts… Une terre encore fumante des derniers émois de la guerre… Aux derniers émois de ces vies retournées au silence de la terre... Sous ce ciel presque noir, encore… Le flux magique rugit encore en mon corps… Glaçant mon sang … Faisant battre à tout rompre mon cœur… Je me tiens droite, sur cet à-pic dominant le vide… Je croise les bras, et baisse la tête.
Lumi : * Trois de moins ! Sempiternelle et Mirifique Rédemption ! Quelle liesse ! *
Je souris à l’exclamation cristalline et enjouée. Je me retourne, et avise, depuis ce magnifique point de vue, la vallée d’Heiron… Le Pic de Vaizel… Heironopolis… Et l'Horizon...
* Mais combien encore, par-delà cet horizon intangible ? *
Suffros : * Trois de moins ici… Trois de plus ailleurs. *
Lumi : * Trouble-fête ! *
* Arrêtez tous les deux… *
Je soupire, piaffant légèrement, amusée de leurs gamineries… Semblant si inféodés, mais pourtant si loyaux…
? : * Ce fut une rude bataille menée tambours battants… Mais n’étiez-vous pas là pour quelques grenats ? *
Je relève la tête, et souris, acquiesçant en silence…
Un bruit… Un frémissement le long de mon échine… Je fais volte-face… Un Asmodien se relève… Le flux magique envahit mon sang, à nouveau, faisant frétiller les muscles de mes bras… Cette haine inextinguible entre nos races… Celle qui pousse aux plus grandes guerres, aux plus vils assassinats, à l’intronisation de la déchéance, de la décadence et de la discorde… Aux inéluctables conflits… Mon bras droit se tend à l’horizontale… Une sphère de feu en jaillit, hurlant… Privé de visage, le cadavre retombe.
Suffros : * Plutôt coriace… Mais toujours aussi pusillanimes que des corbeaux mouillés. *
Mon sang se réchauffe… Le flux le quitte… Il peut maintenant se reposer.
Dos au vide, je tends les bras… Et me laisse tomber… Mes ailes se déploient… Et je redresse mon vol… Le Vent dans les plumes… Ce Vent qui se glisse à travers le tissu de mes vêtements…
Mon regard balaye le sol à la recherche de l’éclat si précieux… L’herbe ondule telle une mer verte avant la tempête… Les quelques créatures qui vivent ici où là vivent dans l’harmonie qui est leur… Lorsqu’elles ne se battent pas pour leur survie ou ne court pas se réfugier.
? : * A ta droite… *
Ma tête se tourne… En effet, un éclat sanguin luit, sur un rocher, au pied d’une barrière d’Heironopolis. Mes ailes se replient… La chute se fait plus rapide… Un redéploiement à l’aplomb du rocher… Et mes porteuses disparaissent… Je tombe doucement sur la pierre sèche, poussiéreuse… Un esprit est à ma gauche… Un Esprit canin, craintif… Un loup, certainement.
Je m’approche du tant désiré grenat… Ma concentration se fait intense… Mes yeux se ferment… Je sens son essence… Son essence qui vibre, se meut… Son essence qui se fluidifie… Je la vois, son essence, d’un rouge flamboyant au milieu du noir créée par mes paupières.
Mes mains se présentent à lui… Mon Esprit se focalise… L’essence s’extrait de la roche qui la retient… Particule par particule... Et se reforme, avec la même minutie, en lévitation, entre mes mains… Je la sens… Je rouvre les yeux… Le cinquième fragment de grenat est là… Précautionneusement, je m’en saisis, et le range dans l’écrin que ma cliente m’a fourni… Le cinquième éclat, et le plus beau de tous. Plus pur que du cristal… Plus rouge que le sang… Elle sera satisfaite.
? : * Plus rouge que tes yeux ? *
Un sombre demi-sourire obscurcit le côté droit de mon visage… Je relève la tête au ciel, et lui jette un regard de défi… Comme si mon Incarné s’y trouvait.
Lumi : * Hihihi. Bien dit. *
Suffros : * Je crois que c’est plutôt de la couleur de tes larmes dont tu devrais te préoccuper… Ou même plutôt de ceux qui les ont vues. *
* Suffros… Tais-toi. *
Suffros : * Comme tu veux… Mais tu n’échapperas pas à ta Destinée. *
Le silence se fait…
? : * Entends-tu, Westen ? *
Je regarde le ciel avec plus d’insistance… Tendant l’oreille… Un Cor résonne… Comme un long râle désespéré qui résonne dans la vallée… Un long râle d’agonie, qui erre et se meurt dans les couloirs rocheux. Mon cœur fait un bon dans ma poitrine… Mes yeux s’écarquillent…
J’avise le vide, et m’y dirige à pleine foulée… J’y saute… Mes ailes se déploient, et fouettent l’air… Le faisant siffler plus vite que le Vent… Un coup de tonnerre… Une explosion blanche… Les Essences de la montagne s’ébranlent, alors que l’orage s’éveille… Le ciel de jais laisse rugir sa colère et hurler sa puissance, faisant trembler toute entière la terre des vivants…
? : * C’est dommageable… *
La pluie commence de tomber… Les gouttes s’écrasent sur le sol, des éclats s’envolent et volent plus loin que les flaques… Le Vent se fait plus violent, encore.
Suffros : * Très prolixe, ce soir. *
? : * Avec de telles provendes, il serait dommageable de ne pouvoir en profiter. *
La pluie me trempe…

Survolant le domaine de Dame Ise, je pique… Le sol se rapproche plus vite que la Nuit à la naissance du Crépuscule… Et atterrit au-devant de la demeure…
* J’aurais bien voulu m’apprêter… Que va-t-elle penser de moi ainsi accoutrée ? *
Dégoulinante dans ma tunique bleuté et dorée, je m’avance au parvis… Et toque à la porte. Le souvenir de ce visage si frêle, mais si noble… Le souvenir de cette voix si fragile, mais si belle… Le souvenir de son Histoire, ou ce qu’elle m’en avait conté… Le souvenir de mes déboires sous ses yeux… Sous ses yeux…

Ruben est occupé a réduire la population de cranes cornus à Théobomos lorsqu'un messager arrive ...

- Duc Ruben !
*tourne la tête*
- Vicomte ! combien de fois faudra-t-il vous le d... *BOIIING!!!*
la tête de la bête vient de s'aplatir avec fracas sur son bouclier
- Restez pas la imprudent, allez m'attendre à l'Auberge, on discutera pendant le déjeuner
- A vos ordres Du..Vicomte ! et le messager fait rebrousse chemin pour aller l'attendre en sécurité

Après avoir occis quelques autres créatures aussi étranges que dangereuses, Ruben va trouver le transporteur et se met en chemin pour l'auberge en empruntant la voie des airs. Arrivé sur place il rentre dans l'établissement, cherche la salle et se retrouve dans la cuisine

- Bon sang mais quel est l'idiot qui a pondu une auberge pareille ?! Il n'y a donc plus que les nains pour savoir faire une auberge digne de se nom ? une auberge où on tombe directement sur le comptoir avec des bocks de mousse bien fraiche qui vous tendent les bras ... tiens, j's'rais mauvaise langue, j'dirais que c'est un architecte asmodien qui l'a conçu ! Cuistot ? c'est par ou la salle ?

Remis sur le bon chemin, Ruben fini par retrouver le messager et prend place en face de lui.
- Quelles sont les nouvelles gamin ?
- Je vous apporte des rapports sur les batailles dans les abysses Vicomte : les forteresses gagnées, les perdues, la routine. Ha et il y a aussi ce rapport de vos agents infiltrés à Heiron. D'ailleurs le cuisinier de la forteresse vous fait dire qu'il n'aura bientôt plus de levures de bière pour faire les gâteaux que la Duchesse Ise apprécie tant.
- Très bien, *chuchotte* mais parle moins fort, les gens ne sont pas censés savoir que j'ai des agents à Heiron et si la Duchesse l'apprend tout va tomber à l'eau ! *reprend son ton habituel* Bon on se revoit donc la semaine prochaine, voila pour toi *fait glisser une bourse vers le messager*.

Ruben se met a étudier les rapports tout en ronchonnant qu'il est Vicomte des grains de sable, qu'il n'a meme pas un bureau pour travailler calmement, ... Le reconnaissant, la serveuse finit par lui apporter un roti de Rynoss cuit à l'étouffée dans son jus avec un assortiment de légumes et un pichet de vin.

Lisant les rapports, il prend connaissance de la prise de contrôle spectaculaire opérée par les élyséens dans les abysses et déchante en lisant le rapport suivant qui explique que tout a été réduit a néant lors de la contre-offensive asmodienne. Viennent ensuite des rapports plus intéressants sur Heiron où il a laissé quelques agents fidèles après son départ pour veiller sur la Duchesse et enquêter sur les maux dont elle a souffert.
Les investigations semblent ne pas avancer beaucoup. Heureusement, il y a toujours Sélène pour surveiller les arrières de la Duchesse, espérons que ca suffira pour nous laisser le temps de trouver de quoi il retourne. Par contre, il semble qu'un nouveau problème touche la légion : des bruits de couloirs de plus en plus insistants et extravagants se répandent à propos de Dame Westen. Certains racontent qu'on peut voir le démon sur son visage, d'autres qu'elle est une envoyée de Bolvig. Heureusement Ruben sait que rien de cela n'est vrai, mais il faudra tout de même tirer cela au clair.

Pas facile de s'occuper de la légion quand on a déjà un désert a gérer ... Pour une fois Ruben se sent petit face a toutes ces choses dont il a la charge ... temporairement, espérons le.

La rôdeuse surveille le ciel... Elle n'aime pas la masse de nuages menaçants qui approchent. Tout semble si différent désormais et si calme... Ca en devient presque effrayant... Le son du cor vient briser ce silence. Elle ferme les yeux, prend une profonde inspiration, et laisse la vibration résonner dans sa tête, faisant remonter ses souvenirs.

Au début il y' avait cette solitude, l'impression de se sentir différente. Pourtant ceux de la nature ne la rejetait pas, et pourtant elle rêvait d'une autre vie. Les images du sommeil lui montraient d'autres créatures comme elle, portant d'étranges peaux et aux attitudes intrigantes. Et parmi ces visages, l'un d'eux ne cessait de revenir encore et toujours.

Elle était belle, magnifique, sublime... Dotée de la prestance de ceux qui dirigent, mais pourtant dégageant une sensation si douce et si apaisante, qu'elle aurait voulu se blottir contre elle, comme un louveteau cherchant la chaleur maternelle.

Les images lui montraient aussi des nombreux combats aux côtés de cette soeur, tous plus acharnés les uns que les autres. Volées de flèches et projectiles enflammés fusaient de toute part, et parfois la vie ne tenait qu’à un souffle... Et dans ces moments là, il y'a avait ce regard entendu. Un simple regard empreint d'une profonde confiance en l'autre. Chacune savait alors quoi faire et naissait une symbiose sans égale capable de renverser même les pires situations. Et à chaque réveil ne lui restait que cette sensation grisante de victoire et celle d’un lien fort qui imprégnait tout son être.

Puis après la solitude vint l'envie. L'envie de comprendre, l'envie de découvrir, l'envie d'être avec "elle". Ainsi s'aventura t-elle hors de son habitat familier, à la découverte d’un tout autre monde, fascinant, peuplé de créatures semblables. Chaque jour, elle venait observer leurs manières, leurs gestes, leurs paroles. Elle ne comprenait rien à tout cela, mais espérait tant pouvoir évoluer avec eux. Avec assiduité, elle tenta d’imiter ce qu’elle voyait, espérant ainsi pouvoir se fondre avec la population.

Quand elle se sentit prête, elle approcha d'un de leurs amas de grottes étranges, décidée à s'intégrer. Elle se heurta à des regards amusés, choqués, ou encore malsains. Elle fit des efforts, montra ce qu'elle avait appris d'eux, tout cela pour voir le fossé se creuser encore alors qu’ils se moquaient, la méprisaient ou la prenaient en pitié... Se sentant menacée, elle mordit un homme qui essayer de poser la main sur elle, puis s’enfuit, courant à en perdre haleine avant de mettre en boule dans un coin sombre et pleurer... Telle fut sa première expérience des hommes.

Pourtant loin de renoncer, elle retourna observer leur vie essayant d'apprendre davantage. Elle identifia les réactions des gens et apprit à les provoquer. Elle apprit à faire rire les gens de ses mimiques et ainsi espéra-elle pouvoir s’intégrer, car elle recevait parfois un peu de nourriture. C’était un début se dit-elle. Avec le temps, cela changerait. Mais rien ne changea. Ce fut alors qu’elle apparut…

En cette fraîche journée, quelques soldats en permission étaient de passage. Enchainant choppe sur choppe, ils furent bientôt assez gris pour s’enticher d’elle. Ils la firent boire, danser, se dénuder… Et elle, se sentant acceptée ne refusa rien. C’est en cabriolant moitié nue sur la place, cernée par un petit attroupement au rire gras, que son regard croisa celui de la femme qu’elle voyait dans son sommeil. Elle se figea immédiatement alors que son cœur s’affola. Elle aurait dû ressentir de la joie à cette vision, mais le sentiment qui s’emparait d’elle était la honte. Elle ne comprenait pas pourquoi mais être ainsi devant cette personne l’emplissait d’une telle culpabilité qu’elle n’osa bouger. Les soldats commencèrent alors à la molester afin qu’elle reprenne son activité. Accablée, incapable de réagir, elle se roula en boule et se laissa faire…

« Assez ! »

La voix tranchante qui s’était élevée avait calmé d’un coup les clameurs de la foule. L’un des soldats fit mine de vouloir protester mais se ravisa lorsqu’il vit la femme fendre l’assemblée et s’approcher. Il déglutit péniblement, puis émit un pseudo grognement de résignation avant de se retirer avec ses compères. Elle avait su montrer sa supériorité écrasante par sa simple présence. Elle jeta un regard noir vers les quelques personnes qui étaient encore là, ce qui eut pour effet immédiat de les faire détaler. Puis la femme vint s’agenouiller devant elle et la recouvra d’une cape avant de la prendre dans ses bras. Elle se blottit, chercha la chaleur qu’elle avait ressentit en rêve et sanglota. La voix était désormais douce et lui murmurait des paroles de réconfort.

« C’est fini, tu n’as plus rien à craindre. Je suis là… Je te protège…»

Elle leva ses yeux mouillés par les larmes, et croisa de nouveau son regard… Tous ses sens étaient dans un état d’excitation intense. La femme était aussi belle que dans ses rêves, sa chevelure blonde encadrant un doux visage aux grands yeux clairs, à la bouche finement ciselée et généreuse, et au nez mignon à croquer. Elle ne réalisait que la moitié de ce qui se passait là, mais ses lèvres articulèrent instinctivement deux syllabes

« I…mi ? »

Le visage rayonnant lui sourit

« Non, je me nomme Ise. Et toi quel est ton nom ? »

Elle ne comprit pas, mais se fendit d’un large sourire et serra Ise dans ses bras. Cette dernière récupérant de la surprise déclara

« Aussi changeante que les phases de la Lune hein ? Alors tu t’appelleras désormais Selene »

Selene expire longuement et ouvre les yeux. Le son du cor résonne encore faiblement dans sa tête. Elle s’empare de son arc et de son carquois et se dirige vers les appartements de Ise, plus déterminée que jamais à protéger celle qui compte plus que tout.

La sorcière repose le cor légendaire sur son support, fourche de bois pétrifié qui évoque les dents d’un félin disparu. On dit que l’appel d’Heiron, par une étrange magie ancienne, peut s’entendre uniquement par ceux auquel il est destiné quelle que soit la distance, qu’il porte jusqu’en Asmodée, que l’écho de sa voix s’amplifie sur les falaises et rejoint les contrées les plus reculées.

Il passera du temps avant l’arrivée de ses compagnons. Elle s’approche de la terrasse, prend quelques biscuits au passage. Le temps est lourd en cette fin d’après-midi. L’orage gronde au loin, le nuages épais martèlent les montagnes autour de la citadelle, mais le soleil perce encore et darde ses rayons sur la pierre chaude d’Heiron. Elle glisse plus qu’elle ne marche, s’accoude à la balustrade, profite de cet instant de paix éphémère, si précieux.

Les enfants jouent au pied des murailles. Ils imitent leurs parents, miment des scènes de combat, vivent des moments de gloire... et d’agonie aussi. Puissent les Cinq leur épargner cette vie que pourtant ils désirent tant. Les commerçants s’agitent, rangent en hâte leurs étals, un oeil inquiet sur l’horizon noir.

Les Daevas se pressent, qui pour rejoindre leurs pairs, qui pour remplir leurs estomacs vides, qui pour rassembler leur progéniture. Un guerrier barbu serre sur son cœur une fillette qui pleure, frotte amoureusement son genou écorché. Un sorcier débutant, les yeux brillants de bonheur, se rend chez le marchand une tunique précieuse au bras. Sa famille mangera ce soir. Une frêle jeune fille toute de rose vêtue et accompagnée d’un esprit de feu, les jambes trop maigres sous sa courte jupe, court vers le téléporteur et sans doute un sombre destin.

-Rose ?

La vison s’estompe dans les brumes magiques. Ise l’a reconnue ! Encore une fois elle lui échappe. Cette fille, cet enfant dont elle n’a aucun souvenir, cette qui l’a soutenue, habillée quand la bête l’avait dépouillée. Que sait la spiritualiste de cet animal maudit, de celui qui l’a possédée, l’a rendue si peureuse et si faible devant l’ennemi, l’a privée un temps du soutien de ses compagnons ?

La bête... Un frisson d’angoisse lui parcourt le dos. Westen sait comment s’appellent ceux qui l’habitent, elle ne connaît pas le nom de l’ombre qui a pris le contrôle de son corps il y a trois mois, ni comment elle l'a vaincue, ni même SI elle l’a vaincue. Le vicomte Ruben, pris entre une spirite aux larmes de sang et une sorcière perdue entre fureur et terreur a eu bien du courage d’accepter la charge de la légion.

Ise pose ses mains sur la pierre qui fraîchit à peine, y sèche ses paumes humides de frayeur. Ses yeux roulent sous ses paupières fermées. Elle se retient de se retourner, espère que la bête ne guette pas juste derrière elle.

Des coups rapides sur la porte la font sursauter. Dans un réflexe panique elle invoque son bouclier, tremblante, son cœur bat la chamade et une fine goutte de sueur froide perle à sa tempe.

- Selene ! hurle-t-elle sans réfléchir alors qu’elle se précipite pour saisir son grimoire, ultime béquille de sa mémoire défaillante.

Se reprenant elle ajoute très vite à l’attention d’un garde qui accourt :
- Non, rien, restez à votre poste !

Ise rassemble ce qui lui reste de courage, pose la main sur la poignée, prend une profonde inspiration et ouvre la porte.

Le Vent se fait de plus en plus froid, alors que la tempête gagne en puissance… La pluie a ôté à la vie son effervescence… Roche et bois sont seuls piliers de cette cité… Derrière le rideau de gouttes, juste des matériaux mouillés… Il ne reste pas un éclat de vie sous ce ciel d’encre…
Suffros : « Elle ne se presse pas… »
Je souris, croisant les bras… Tournant les talons au seuil de la porte… Retournant sous les trombes d’eau… Une fraîcheur libératrice…
Lumi : « Le ciel est si noir… Sa pluie si abondante… Son orage si clair et si puissant… Le Ciel Asmodien viendrait-il pleurer ses déchus pourfendus par les Élyséens ? »
Des gouttes, qui tombent par centaine… Par millier… Une goutte par mort de notre guerre… Un coup de tonnerre par corruption… Ces larmes du ciel… Un mal violent à l’Esprit… Comme si mon crâne implosait… Je baisse la tête et porte deux doigts à mon front, crispant les paupières…

La douleur s’atténue soudain… Mort-née. Je relève la tête… Ouvrant les yeux… Le monde entier est de noir et blanc, plus ou moins dégradé chacun… Un silence de catacombe règne… La pluie a cessé comme le pas d’un seul homme… Je ne reconnais plus les abords de la demeure de la Duchesse… Cette clairière… Bordée de grands arbres seulement à moitié feuillés… Elle… Elle me rappelle quelque chose…
? : _ Des Asmodiens ! Au secours !
Je fais volte-face… Un paysan sort d’un fourré, courant à en perdre haleine… Avant qu’une flèche meurtrière ne le rattrape… Et ne se plante dans son dos… Il choit à mes pieds, expirant une dernière fois… * Mais qu’est-ce que… *
Six Asmodiens arrivent dans la clairière… Deux rôdeurs, un assassin, deux sorciers et un clerc. La haine s’empare de mon cœur… Je le sens bouillonner… Un volcan de lave, voilà ce que j’aimerais leur réserver !
Soudain… Des feuilles se soulèvent… Le ciel si clair s’est obscurci en un battement de cœur… L’orage gronde… La pluie se fait surabondante… J’en viendrais presque à douter d’une cécité de ma part…
Un coup de Vent… Et des ailes d’un bleu mirifique qui se déploient… Les six ennemis hurlent de peur et partent dans le sens inverse de leur arrivée… Je fais deux pas en avant, regardant la nouvelle venue… * Non… Non… C’est… C’est impo… ssible… * Je sens mon cœur se fendre… Ce souvenir…
Les six rivaux se voient atteins du sort d’Érosion. Les ailes battent puissamment l’air… La chevelure blanche, coupée et agencée de la même manière que moi, encadre un visage d’ange aux yeux blancs. Le corps est vêtu d’une superbe robe rouge, or et blanche. Cette silhouette… Que je reconnais… Et qui me brise le cœur…

Un hoquet de surprise… Le voile du rêve c’est déchiré pour laisser place à ce rideau de pluie… Une pluie… Rouge ? Le bruit est revenu… Ce visage… Ce visage que j’aimais tant…
? : « Westen, essuies tes yeux, vite… »
La question m’intrigue… Je porte une main à ma joue… Du sang… Mon cœur saigne… Mes yeux laissent mes larmes couler sur mes joues…
Suffros : « Et après on va encore m’accuser et me traiter d’Asmodien… Félicitations… »
Un bruit à l’arrière… Je me retourne… Je sens mon cœur se serrer… Je fais volte-face derechef, et sort un mouchoir de ma sacoche, essuyant mon visage… Le tissu rougit… * Il ne manquait vraiment plus que ça… *
Deux larmes rouges glissent sur ma peau… Laissant ma vue claire… J’espère qu’il ne reste trace sur ma peau blanche… Dame Ise avait été suffisamment effarée et horrifiée…

Je me retourne… La mirifique Duchesse est à son seuil… Je n’arrive pas à sourire, prise dans le feu de l’inquiétude… Je m’avance vers elle d’un pas hésitant… Son, regard… Si doux soit-il… Je le crains… Je sens la rédemption en elle… La rédemption sempiternelle, héritage d’une déesse dont elle doit aussi tenir sa beauté.
Je m’agenouille bassement, le plus noblement que je le peux… Trempée jusqu’à la moelle de mes os…
_ Duchesse, votre beauté redonne à ce ciel terni d’ombre son Soleil et sa beauté.
Un murmure presqu’entièrement happé par le vent… Je n’ai pas envie de me relever… Pas envie d’affronter ce regard… Hâbleuse ? Peut-être. * Je préfèrerais le silence à quelque élucubration… *

Ce visage… Ce visage… Il m’obsède… Il m’opprime… Mon angoisse grandit… J’essaye de le chasser de ma mémoire… Vainement… Je ne dois pas y penser… Maintenant… Pas… Pas maintenant… Non… Ce regard si doux… Ses courbes si parfaites… Cette puissance rayonnant dans une aura magnifique. Je retiens son nom… Si je le prononce… Je… Je ne tiendrai pas… Et je devrai à nouveau fuir… Des larmes de sang… Dame Ise en est déjà assez affectée…

J’attends en silence… Je ne sais pas quoi dire d’autre… Un battement de cœur devient une éternité… * Puissent les Seigneurs Empyréens veillez sur toi en l’Empyrée des Élyséens… Que les cinq te gardent… * Ma bénédiction me rougit les yeux… Je tente de retenir les larmes… De les résorber… Je déglutis, et me concentre… Je ne dois faillir, pas encore une fois…

Nous étions heureux Radaa, père et moi, nous marchions tranquillement dans la forêt d'Heiron en nous racontant des choses de la vie, profitant de cette douce brise qui nous caressait le visage. Père nous parlait de mère que nous n'avions malheureusement jamais connu, ce devait être une femme exceptionnellement belle et d'une douceur incomparable. J'essayais en vain de m'imaginer cette beauté dans ma tête.

Alors que j'étais entrain de poser mes lèvre sur l'eau douce et cristalline de la rivière, soudain je senti les vibrations de l'eau me traverser comme une flèche d'archer tirée en plein coeur. Je mis mes mains contre mes oreilles afin de ne plus entendre ce bruit qui me glaça le sang.

Père nous regarda et nous dit "c'est l'heure mes fils, votre destin de chevalier commence ici et maintenant", je le regarda avec effroi et lui dit, "comment ça c'est l'heure? l'heure de quoi?"

Soudain une ora apparu devant nous, d'une puissance et d'une douceur comme je ne l'avais jamais connu. Père se prosterna devant cette lumière éblouissante et se retira un peu plus loin nous laissant seul avec cette force qui nous cloua au sol, je ne pouvais plus faire un pas ni en avant ni en arrière, je tombai les genoux à terre, en relevant la tête, je vis un visage d'homme, ce visage qui me hantait depuis ma plus tendre enfance mais que j'avais décidé de mettre coté, enfin c'est ce que je pensais.

"Arieluma Shunhades et Radaamanthys fils de Shaion et de Pandora, je suis vote père Shaion", il se tourna vers mon père et lui fit un grand sourrir qui je le compris voulais dire "merci".

Il nous raconta alors que nous étions les fils de deux Daevas qui avait combattu lors du grand cataclisme qui divisa notre monde en 2 partie. Nous sommes nés en pleine guerre contre les Balaurs, mes parents pour nous protéger décidèrent de nous confier une personne de confiance afin que nous puissions grandir et vivre nos vies d'enfant en tout sécurité.

Cette personne n'était autre que cet homme que nous considérions comme notre père pendant toute notre vie "Gabriel" qui prit soin de nous et nous enseigna l'art du combat.

"Mais pourquoi n'as tu rien dit avant?" dit Radaa en se retournant vers Gabriel, "j'avais fait la promesse d'attendre que le cor ne résonne dans la vallée avant de vous mettre au courant".

"Quel est donc ce cor justement, pourquoi avez vous attendu tout ce temps avant de nous dire la vérité"? dit Radaa, je senti une colère et une incompréhension en lui qui était prête à jaillir de son corps comme la lave d'un volcan.

Shaion nous regarda droit dans les yeux et nous dit : "c'est l'appelle de votre Duchesse Ise, vous devez la rejoindre, la guerre pour la Tour de l'Eternité a commencé, la légion se mobilise en ce moment même, vos compagnons ont besoin de toi et de ton frère.

"Lors de la dernière guerre, la légion a connu un bouleversement, beaucoup de leurs membres sont mort ou ont disparu, vous devrez la faire perdurer, vous êtes l'une des communauté qui sauvera Atreia, mais vous devrez vous unir dans le combat à d'autres légions tout aussi puissante que la votre. Armes et foi mes fils".

L'ora avait disparu, notre père adoptif Gabriel également, je regardai Radaa qui était complètement anéanti et bouleversé par ce qu'il venait d'entendre, je le pris alors dans mes bras et lui dit : "Aller petit frère, ne soit pas triste nous avons eu une enfance heureuse, maintenant notre devoir nous appelle, sèche tes larmes et déploie tes ailes, nous devons rejoindre le reste de la Légion, Ruben, Ise, Selene, Akaha et les autres nous attendent".

Marchand sur les plages de Verteron, les pensées plein la tête, accompagnée de sa jeune fille âgées de 3ans. Le soleil tapant sur ma peau découvert, je regarde Eterniella s'amusait avec les tortues, le sable et l'eau..
" Comme tu es belle, ma princesse.."

Un centurion de la forteresse de Verteron arrive en courant.. Qu'est ce d'aussi important..

- Bonjour Baronne, vous avez reçu un message de la part d'une de vos citoyens. Il tend le parchemin et repart lorsque je le prend.

Citation :

Lettre à la Baronne

Bien le bonjour Baronne,
Il y a des nouvelles bien piquante pour votre légion, Eh oui, votre citoyenne, Westen est revenue !
En ce qui concerne les activité de la légion, le groupe d'amis s'éclate, ne vous en faite pas pour eux.
A bientot,
Votre fidèle serviteur.

"Est-ce possible? Westen est de retour, l'ange à plume de la légion, celle qui rayonne de bonne humeur.. "

Les cheveux au vent, je fermes les yeux et soupir longuement.
" Ma vie d'avant me manque tellement.."

Eterniella s'approche, se blottie contre moi, du sable collant sur sa jupe du à l'eau. Elle me regarde, d'un regard interrogateur.
- Ça va maman?
- Très bien, ma puce *le souffle court, les souvenirs envahissant mes pensées*

Que vaut cette vie? Lunium n'est plus présent, Eterniella grandit tellement vite.. Et je périe dans mes souvenirs.. L'abandon approche, comment leur annoncée..

" J'aimerais revenir à ma vie, celle qui trahissait mon coeur... Que dois-je faire? "

Ise ouvre la porte. Après tout elle est à la citadelle, elle ne craint rien. La robe et la coiffe de la visiteuse la rassure, mais pourquoi lui tourne-t-elle le dos ? Elle reconnaît Westen, trempée sous la pluie qui se déchaîne, sa robe si proche de la sienne, son esprit de vent encore adolescent et surtout, surtout, ce mouchoir rouge qu’elle range en hâte.

La spirite s’agenouille, bredouille un salut inaudible couvert par le tonnerre qui gronde.

- Vous avez été rapide Westen mais entrez, entrez vite vous allez prendre froid.

La sorcière s’efface, mais son invitée ne bouge pas. Elle hésite, puis vient la relever. Presque de force, elle l’entraîne vers le salon de réception et l’assoie sur son fauteuil. Sur un signe de la Duchesse un garde apporte des couvertures chaudes et s’emploie à couvrir la spirite. L’esprit de vent furète en tout sens, soulève l’immense carte posée sur la table centrale dont le bois est patiné par le temps. La sorcière fronce les sourcils, l’esprit s’écarte et se pose contre le mur.

- Merci de votre présence Westen. Je vais commander une petite collation pour patienter en attendant nos compagnons. Réchauffez-vous tranquillement... et séchez vos larmes, ajoute-t-elle avec un sourire rassurant.

Ise se rend aux cuisines toutes proches. Le chef avale sa salive et regarde d’un air apeuré vers ses aides qui affichent une mine résignée.

- Bonjour Chef. J’attend mes compagnons et il faudrait apporter un petit « en cas » pour leur permettre de se restaurer au fur et à mesure de leurs arrivées.
- Quelques biscuits devraient suffire, suggère le Chef , le regard plein d’espoir ?
- Oui, deux ou trois cent, répond la sorcière avant de marquer une pause pour réfléchir. Heu... ajoutez quand même une dizaine de rôtis de porgus, quelques salades bien belles, quatre ou cinq plateaux bien garnis de sushis, sept poissons grillés et la sauce dont vous avez le secret, un gros pâté de nos campagnes, des saucissons, deux de chaque sorte, un gros fromage de chacune de nos régions, et huit gros pains bien chauds.

Alors que la duchesse se retire de son domaine, le chef ajoute avec une ironie à peine dissimulée :

- Ce sera tout ?

Ise s’arrête, intriguée. Qu’aurait-elle oublié ?

- Ah oui, s’exclame-t-elle en sortant. N’oubliez pas de disposer cinq tonnelets de bière des nains, quelques vieilles bouteilles s’il en reste encore, et un échantillonnage conséquent de votre savoir faire en pâtisseries... plus quelques viennoiseries ?