Panique

"Ise ?"

Selene réussit à articuler ce simple nom.
Contemplant les appartements vides et froids, Selene sent les battements de son cœur s’accélérer, puis d’un coup se serrer, lui coupant le souffle…
Panique… Mal à respirer… Peur… Les émotions primaires reprennent le dessus. Incapable de réfléchir, Selene hurle à pleins poumons

"Ise !!!"

Son écho se perd dans les couloirs… Personne…
Ses forces l’abandonnent, ses jambes lâchent. Elle tombe à terre, haletante, les yeux fouillant les moindres recoins à la recherche d’indices…

Tout est arrivé si vite... Le départ annoncé de Ruben, l’un des derniers remparts de la légion avait réduit à néant tout ce qui restait. Tous le comprenait, mais chaque séparation était toujours aussi dure. L’esprit n’y était plus. Et peu à peu, tout s’effritait, et laissait paraître la véritable nature de la légion : Une structure vide et morte… Personne n’espérait plus rien. Is et Selene ne faisaient pas exception. La torpeur les gagnait peu à peu, lassées des combats, lassées des règles stupides qui régissent ce monde. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’elles ne décident également de partir vers d’autres cieux.
Alors qu’il s’apprêtait à partir, Ruben avait laissé ses dernières économies à la légion. Il s’agissait là d’une coquette somme. Mais bon, Selene ne convoitait pas, car elle gagnait déjà bien assez, en appliquant les conseils d’Ise sur les marchés.
Ce soir là, Selene était de passage à Sanctum pour surveiller les ventes. Rêveuse, elle fut surprise par une main posée sur son épaule. Se retournant elle reconnut la grande et large stature de Akha, le fier guerrier, pilier inébranlable qui soutenait encore la légion. Elle esquissa un large

- "Je t’ai trouvé" dit-il rendant son sourire à Selene.
"D’un côté ce n’est pas dur, tu traînes toujours là ces derniers temps. Mais dis moi plutôt, toi qui comptes partir bientôt, pourquoi continues tu d’acheter et de vendre ?"

- "Ben… ça m’occupe ? fit-elle en haussant les épaules"

- "On dirait que tu gagnes bien en tous cas. Moi je ne suis pas doué pour ces trucs. Du coup je suis toujours juste sur ma bourse."

C’est là que l’idée folle naquit. Soufflée par son inconscience, son insolente spontanéité, elle explosa pour virevolter dans son esprit.

- "Ben tu sais, je connais un moyen infaillible d’avoir très vite une grosse somme d’argent."

Akha parut enthousiaste. Selene enchaîna

"Il te suffit de retirer l’argent qu’a déposé Ruben dans le coffre de la légion."

Akha se refrogna

- "Non, je ne peux pas faire ça voyons. C’est l’argent de la légion"

Selene respira un grand coup, le fixa droit dans les yeux

- "Rubenou part, Shun, Rada partent aussi. Ise et moi on partira tôt ou tard. Les autres ? On le les voit guère… A ce jour, la légion c’est toi. Tu es le seul encore vaillant, le seul à combattre contre l’adversité. Si tu as besoin de cette somme pour t’aider dans ton combat, peut-on te la refuser ? Et puis au pire, tu pourras toujours la rembourser si quelqu’un en a besoin non ?"

Akha montrait encore une pointe de scepticisme, mais les paroles de Selene finirent par le convaincre… Le mal était fait…

…

Selene arpente les couloirs, s’appuyant contre les murs fait de pierres lisses et froides… Elle appelle désespérément Ise… Elle l’a déçue… cette simple pensée la fait fléchir, sa poitrine serrée au point qu’elle ne peut respirer…

"Quelle conne ! Pourquoi t’as dit ça ! S’injurie t-elle mentalement"

Elle essaie d’inspirer et d’expirer lentement mais rien n’y fait. L’angoisse la ronge, lui brouille les sens. Sa vue se trouble, ou alors sont ce ses larmes ? Selene se prostre en position fœtale, ferme les yeux et sanglote. Elle murmure sans relâche le nom d’Ise, essayant de la joindre mentalement… Aucune réponse… Elle t-elle trop instable pour réussir à établir un contact ? Ou est ce Ise qui la bloque ?
La peur sen mêle, érode ses convictions, ses défenses… Peut-être lui est-il arrivé quelque chose de grave ? Le délire s’empare de son esprit et dévoile peu à peu la noirceur de son passé… Selene résiste. Ise a promis de ne jamais l’abandonner. Elles se sont promis d’aller ensemble au bout. Elle s’accroche à cette idée, essaie de balayer l’image du gouffre sans fond, puits de souffrances éternelles, mais combien de temps tiendra t-elle avant de sombrer ? Elle gémit encore et encore

"Suis désolée ! Je voulais pas te faire du mal, je voulais pas ! Me laisse pas ! T’as promis ! S’il te plaît ? J’ai peur ! J’ai si peur que tu m’abandonnes ! Je veux pas ! "